AVS : une réforme en urgence


Le financement de l’AVS, première assurance sociale de Suisse, est en difficulté depuis un quart de siècle. Le 25 septembre prochain, il est impératif que le peuple accepte la modification de la loi sur l’AVS ainsi que la modification de la Constitution pour relever le taux de TVA. Indissociables, ces deux volets du projet doivent être acceptés pour que l’assainissement puisse voir le jour. Explications avec la présidente de la Chambre patronale de l’Union Patronale du Canton de Fribourg (UPCF), Liliane Kramer.

Pourquoi la réforme AVS21 est-elle indispensable ?

Il faut savoir qu’à ses débuts, l’AVS était assainie en moyenne tous les cinq ans. Or, la dernière grande réforme de l’AVS remonte à 25 ans (1997). Ce qui pose le défi le plus important à notre prévoyance vieillesse, c’est l’évolution démographique. Au départ, le rapport entre les actifs et les retraités était de six pour un. Cela a bien changé. Avec le départ à la retraite de la génération du baby-boom, le nombre d’actifs diminue, tandis que celui des retraités augmente rapidement. Bientôt, le rapport sera de deux pour un. De plus, l’espérance de vie a globalement augmenté de près de dix ans depuis l’introduction de l’AVS en 1948.

Dans ce contexte, l’AVS manque d’argent. L’Office fédéral des assurances sociales estime le déficit cumulé entre 2020 et 2045 à environ 200 milliards de francs, ce qui correspond au coût de 16 tunnels de base du Saint-Gothard. Si l’on veut que la principale institution sociale de Suisse continue à verser des rentes aux générations futures, il est donc urgent de l’assainir.

Que pensez-vous de l’idée d’assainir l’AVS par le biais de la TVA ?

Je trouve qu’il s’agit d’une proposition défendable, car elle est équitable pour toutes les générations. Tout le monde participe au financement de l’AVS au travers des biens de consommation qu’il achète. Il faut se rendre compte que les seules modernisations structurelles ne suffiront pas à stabiliser l’AVS pour les générations futures.

Des mesures financières sont également nécessaires pour garantir l’assurance sociale la plus importante de Suisse. L’augmentation de la TVA de 0,1 et 0,4 point de pourcentage en fonction des biens apportera à l’AVS des recettes supplémentaires jusqu’à 1,5 milliard de francs par année. Des estimations ont été faites et il est intéressant de noter que les dépenses annuelles qui découleraient de cette augmentation de la TVA s’élèveraient à environ 200 francs pour un ménage suisse moyen.

La réforme de l’AVS repose donc sur la modification de la loi sur l’AVS et celle de la Constitution fédérale concernant l’augmentation de la TVA. Que se passe-t-il si l’un des deux projets n’est pas accepté ?

Les deux projets doivent impérativement être acceptés car ils sont intimement liés. Nous devons voter sur les deux car un référendum concernant la modification de la loi sur l’AVS a abouti, et la modification de la Constitution fédérale est obligatoirement soumise au peuple. Dans l’intérêt de toutes les générations, j’espère que ces deux objets seront acceptés car cela permet de commencer le chemin de l’assainissement de l’AVS. La réforme AVS21 apporte des solutions pour assainir le financement de l’AVS, dans la tourmente depuis vingt-cinq ans. Voter deux fois oui le 25 septembre est indispensable pour assurer sa pérennité.

Il faut se rendre compte que si ce n’est pas accepté, les travailleurs devront payer davantage au travers de l’augmentation de leurs cotisations salariales. Cela signifie que la population active portera sur ses épaules l’assainissement de l’AVS.

Cette réforme comporte un point concernant l’augmentation de l’âge de la retraite des femmes. Qu’en pensez-vous ?

Je suis favorable à l’harmonisation de l’âge de la retraite entre les hommes et les femmes. Nous ne devons pas oublier que nous avons besoin d’une solution pour garantir les rentes des générations futures et c’en est une efficace. D’abord, elle permettra de moderniser le système, qui repose sur une image dépassée des rôles. Ensuite, cette mesure permettra de renforcer le premier pilier grâce à des recettes supplémentaires
d’environ 1,4 million de francs par année en 2032.

Il faut aussi souligner qu’en remplaçant l’âge de la retraite par un âge de référence, le projet offre la possibilité de maintenir plus longtemps les travailleurs qualifiés dont font partie les femmes sur le marché du travail.

La réforme AVS21 est-elle une solution durable qui permettra aux jeunes de toucher l’AVS dans trente ou quarante ans ?

Cette solution est la bonne voie pour les années à venir. Cependant, il ne faut pas oublier que l’AVS doit suivre l’évolution de la société, d’autres révisions seront certainement nécessaires dans le futur. Quand cela sera le cas, il faudra garder à l’esprit que l’âge de la retraite doit être adapté en fonction des professions. Par exemple, dans la construction ou les soins, les métiers sont physiquement durs, il est donc justifié que l’âge de la retraite soit différent. En parallèle, une révision du deuxième pilier (LPP) pointe son nez et devient tout aussi urgente que celle de l’AVS.

En résumé, ce projet prévoit :

  • L’harmonisation de l’âge de la retraite des hommes et des femmes : L’âge de la retraite des femmes est aligné sur celui des hommes, ce qui permet de moderniser le système, qui repose sur une image
    dépassée des rôles. L’adaptation de l’âge de référence est prévue progressivement et permettra de renforcer le premier pilier grâce à des recettes supplémentaires d’environ 1,4 million de francs par année en 2032.
  • Des mesures de compensation pour les femmes de la génération transitoire : La réforme AVS21 prévoit des mesures visant à atténuer les effets du relèvement de l’âge de référence pour les femmes proches de la retraite au moment de l’entrée en vigueur de la réforme. La génération transitoire comprend neuf années et concerne les femmes âgées de 55 ans ou plus au moment de l’entrée en vigueur de la réforme. Ainsi, si AVS21 entre en vigueur en 2024, les femmes concernées seraient celles nées entre 1961 et 1969.
  • Une retraite flexible dans l’AVS : La rente de vieillesse pourra être perçue entre 63 et 70 ans pour les hommes et les femmes et entre 62 et 70 ans pour les femmes de la génération transitoire. Un ajournement ou l’anticipation d’une partie de la rente sera donc possible. Les taux de réduction ou d’augmentation en fonction de l’option choisie seront fixés par le Conseil fédéral.
  • Des incitations à poursuivre une activité lucrative après 65 ans : La réforme AVS21 offre la possibilité de renoncer à la franchise pour les personnes exerçant une activité lucrative après l’âge de la retraite et les cotisations payées après l’âge de référence (65 ans) seront prises en compte. Ceci augmente la possibilité de combler les éventuelles lacunes de cotisations, tout en améliorant la rente AVS jusqu’à un montant défini.
  • Une réduction du délai de carence pour bénéficier d’une allocation pour impotent de l’AVS : Le délai de carence pour avoir droit à une allocation pour impotent de l’AVS est réduit à six mois, au lieu d’une année.
  • Un financement additionnel par le biais de la TVA (arrêté fédéral) : La réforme AVS21 prévoit le relèvement de la TVA entre 0,1 et 0,4 point de pourcentage afin d’apporter à l’AVS une nouvelle source de financement. Cette mesure permettra d’assurer à l’AVS des recettes supplémentaires annuelles d’environ 1,4 milliard de francs.